Détention et terrariophilie: la vision globale et la vision ciblée

Introduction. L’incroyable capacité des reptiles à s’adapter, ou survivre, dans des environnements différents offre aux terrariophiles des possibilités incroyables quant à la conception de l’environnement de leurs individus captifs. Lorsque l’on observe les débats des réseaux sociaux au sujet de choix, nous pouvons souvent voir arriver la phrase « dans la nature…. » servant généralement à justifier le choix faisant débat. Prenons un peu de recul et observons ces débats sous un angle différent.

Préambule

Prenons le cas d’une détention classique de Python regius.  Le choix n’est pas anodin puisque la dimension est souvent sujette à débat: rack, terrarium de 45x45x60, terrarium de 200x60x60, avec UV, sans UV, plantes naturelles ou artificielles etc. Les célèbres phrases « dans la nature… » prennent alors tout leur sens:

  • « Dans la nature, il vit dans un terrier, donc il n’a pas besoin de place, ni d’UV »
  • « Dans son environnement, il n’y a pas beaucoup d’arbres, donc il ne peut pas grimper »
  • etc.

La vision globale

La vision globale devrait regrouper l’environnement naturel, et les grosses lignes de la biologie. Les questions à se poser sont alors:

Quel est son environnement ?

  • Le sol a un rôle primordial puisque qu’un substrat non adapté aura des conséquences sur l’animal (brûlure, occlusion intestinale, coupure, etc.)

    Quel est le substrat naturel ?
    • Du sable ?
    • De l’argile ?
    • De la terre ?
    • Est-ce garni d’herbe ?
    • Est-ce feuillu ?
    • Humidité du substrat ?
  • L’écologie a un second rôle primordial, car il informe des conditions météorologiques que l’on devra effectuer au sein du terrarium afin d’apporter un biotope adapté au plus proche de son environnement.

    Y a-t-il des cycles saisonniers ?
    • De quel type ?
    • Mousson ?
    • La période hivernale est-elle marquée ?
    Quelles sont les températures ?
    • Ces températures sont-elles stables à l’année?
    • Ou y a-t-il des variations importantes ?
    • Quels sont les piques de températures hautes et faibles
    • Le biotope donnera les dernières informations de bases, offrant une vision globale des paramètres à obtenir pour le maintien de l’animal et observer un comportement se rapprochant du comportement naturel.

      Quel est le milieu de vie ?
      • Une forêt ?
      • Une savane ?
      • Un désert ?
      Quelles sont les particularités de ce milieu de vie ?
      • Tropical humide ?
      • Aride ?
      • Désertique ?
      • Forestier ?

En répondant à ces questions, nous obtenons le biome. Dans le cadre du Python regius, nous avons un sol argileux/sableux, peu marqué par les saisons, dont les températures sont relativement stables à l’année. C’est une savane aride.

Inutile donc de mettre des copeaux de bois comme substrat, par contre, comme c’est « sableux/argileux », un mélange de tourbe et d’excavator permettra d’obtenir le bon sol. Les températures étant relativement stables, un tour sur des guides touristiques ou sur la page climatologique des pays dans lesquels il se trouve donnera une idée des paramètres jours/nuit à obtenir. L’endroit dans lequel il vit peut également informer du cycle jour-nuit pouvant être programmé dans le terrarium également en tenant compte des saisons.

Par ailleurs, les informations ci-dessus donnent de nombreuses informations sur la biologie de l’animal et informent généralement de manière relativement précise si ce dernier demande une période d’hivernation, de jeûne, etc…



La vision ciblée

Elle va permettre de définir plus précisément des informations au bien être de l’animal car nous nous intéressons directement à sa biologie.


Ses caractéristiques physiques permettrons de nous informer des dimensions du terrarium:
  • Quelle est la taille de l’animal ? Il est recommandé de lui donner au moins 1x à 1,5x sa longueur pour qu’il puisse s’étirer de tout son long. Nous y reviendront.
  • Quel poids atteignent-ils à l’âge adulte ?
  • Quel est son aspect ? Trapu ou élancé ?
Quel est son mode de chasse ?
  • À l’affût ?
  • Chasseur ?
Que chasse-t-il ?
  • Mammifères ?
  • Poissons ?
  • Insectes ?
  • Autres ?
Son type de proie change-t-il avec le temps ?

Quelles sont les moeurs de l’animal ?
  • Nocturne ?
  • Diune ?
  • (Semi-)fouisseur ?
  • Terrestre ?
  • (Semi-)arboricole ?
Quels sont les couleurs et motifs de l’animal ?

Intérêt

À ce stade, il est évident que certaines documentations scientifiques deviennent intéressantes pour comprendre plus précisément le reptile et obtenir les meilleures réponses, mais d’une manière globale nous pouvons obtenir toutes ces informations rapidement, y compris en français.

Nous avons, dans notre exemple, un animal d’environ 1m20 à 1m30, pouvant atteindre 2kg ou plus, d’aspect trapu qui chasse des mammifères, sans changement nutritif connu, qui est nocturne et terrestre mais des observations d’individus perchés sur une branche ont été observés.

Les caractéristiques de l’animal vont nous permettre de déterminer les dimensions du terrarium. Ce thème est régulièrement abordé dans d’autres pages du site.

L’aspect de l’animal informe d’ailleurs relativement bien du type de décoration qu’il est possible de mettre et de la taille des éventuelles futures proies.

Le mode de chasse donnera une idée du « degrés » d’ouverture de la décoration. En réalité, la décoration peut-être quasi similaire que la chasse soit à l’affût ou non. Il faut simplement tenir compte qu’il faut une certaine place au serpent pour se mouvoir et permettre de faire avancer la proie dans le corps. Ce n’est généralement pas un vrai problème mais il devient alors plus aisé d’observer les phases de chasse des animaux (surtout ceux qui chassent à l’affût) et de répondre aux besoins.

Le type de proie informera à la fois du régime, et, conjointement aux mœurs et à l’écologie, des meilleurs moments pour donner des proies, y compris de la fréquence de nourrissage. En milieu saisonnier cyclique comme au nord et au centre de l’Europe, les reptiles hivernent, donc l’hiver est marqué par un jeûne. Par contre en savane africaine, ce cycle est absent et l’animal à probablement des périodes de baisses nutritives (absence de la période de reproduction des oiseaux par exemple), mais est moins important.

Beaucoup d’éleveurs tentent de démarrer les juvéniles au gavage de rongeurs, ou de pâtés. En s’intéressant au changement du type de proie, nous pouvons peut-être répondre aux besoins de l’animal en induisant moins de stress à celui-ci que par le gavage. Le changement ontogénique peut informer de ce type de changement de proie, mais ce n’est pas toujours le cas.

Les mœurs vont permettre de finaliser la mise en place du terrarium et de respecter le cycle de vie de l’animal. Une espèce crépusculaire/diurne aura besoin de moins d’UV qu’une espèce diurne, mais probablement d’une cachette (un gros pot de fleur camouflé dans la terre peut faire l’affaire dans le cas du Python regius). Par ailleurs, et bien que ce ne soit pas toujours vrai, il est possible que l’animal soit plus réceptif ou enclin à manger en période de chasse, correspondant à sa période d’activité. Le côté arboricole/terrestre/fouisseur donne une bonne indication de la décoration à mettre en place et de l’éventuelle hauteur du substrat si l’on veut, dans notre exemple, créer une galerie.

Dans le cas du Python regius, bien qu’il chasse à l’affût, il sort de son terrier pour le faire, donc il a un espace approprié à s’étirer. Son régime alimentaire ne semble pas varier (bien qu’il le sera toujours plus en nature qu’en terrariophilie) ne nécessitant peu d’UV, un peu de fraîcheur dans sa cachette mais pouvant faire chaud à la surface du sol (éclairé par le soleil), ne nécessitant pas d’hivernation mais étant potentiellement dépendant du cycle de reproduction de ses proies, pouvant justifier les jeûnes.

Les couleurs et motifs des animaux peuvent également donner des idées concernant la construction de leurs biotopes. Les couleurs vives sont souvent synonymes d’une évolution de signaux aposématiques. Mais ils ne signifient pas pour autant qu’ils sont contrastés avec le biotope. À l’inverse, d’autres espèces se camouflent particulièrement bien dans leur environnement naturel. Enfin, le mélanisme capte plus la chaleur et ne nécessite donc pas autant d’exposition au soleil qu’une espèce ne possédant pas de noir pour se thermoréguler

Conclusion

La vision globale offre une vision d’ensemble des conditions de vie de l’animal, là ou la vision ciblée apportera les réponses aux besoins du reptile. L’une ne va pas sans l’autre et il convient de prendre l’ensemble des paramètres globaux qui influence les paramètres ciblés et vis versa pour répondre aux besoinx du reptile captif.